Dans le milieu très conformiste des architectes, que j’ai fréquenté (parfois à contrecœur) depuis mes études à UP8 et UP6 Paris, il existait - et il existe encore - sinon une pensée unique, du moins une forte pression, un systèmes de valeurs esthétiques où les avant-gardes, la ligne pure, et le minimalisme, occupent le haut de l’échelle tandis que le pittoresque et le décoratif sont généralement méprisés. Héritage du Bauhaus et du Mouvement Moderne, mais aussi, dans la période actuelle, dialogue permanent avec l’Art Contemporain.
Il y eu pourtant, pendant les années 70 et au début des années 80, dans le sillage de mai 68 et en relation avec le pop’art, une floraison de contestations de cette esthétique architecturale avant-gardiste dominante : le post-modernisme de Venturi et Michael Graves, l’architecture rationaliste urbaine autour d’Aldo Rossi et des frères Krier, les courants d’auto-construction et d’urbanisme participatif dominés par le modèle de l’Egyptien Hassan Fathy, ou encore l’historicisme chic d’un Spoerry (Port-Grimaud), ou d’un Quinlan Terry.
Ces mouvements ont sans doute laissé une trace dans l’enseignement, mais ils ont été un feu de paille et n’ont pas résisté au retour du High-Tech, du conceptuel, et de la radicalité plastique recherchés par les élites bourgeoises.
Pour tous ceux qui, comme moi, sont plus sensibles aux beautés pittoresques de la ville traditionnelle qu’aux lignes monotones et décharnées des quartiers dessinés par les architectes du XXe siècle, d’Auguste Perret à Rem Koolhaas, la tâche n’a jamais été facile. C’est pourquoi, dans les années 90, il m’a semblé important de montrer, à travers l’étude des peintures représentant la ville, que l’esthétique des paysages urbains historiques, vantée et analysée au XIXe siècle par Camillo Sitte, avait été ressentie et comprise dès la Renaissance (et sans doute pressentie dès le moyen âge) même si elle n’avait jamais vraiment été théorisée, parce qu'elle s'opposait à la théorie classique du beau. Par ailleurs, ma fréquentation des écrits de mathématiciens comme Benoît Mandelbrot et René Thom, m’a donné le sentiment que les concepts de la géométrie fractale et de la topologie pouvaient justement appuyer une théorie esthétique des formes régulées mais morcelées, et mettant en jeu les emboîtements d’échelles, formes spécifiques des paysages urbains traditionnels. De là est née en 1996 une recherche, aidée par le Bureau de la Recherche Architecturale : Le paysage urbain dans la peinture au Moyen-âge et à la Renaissance : l'émergence d'une esthétique fractale ; elle n’a malheureusement jamais pu être publiée.
Je la mets aujourd’hui, grâce à internet, à disposition de tous ceux que ce sujet intéresse (pour la télécharger au format pdf, il suffit de cliquer sur le lien du titre).
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