présentation des peintures synchronistiques

vendredi, mai 21, 2021

Magie noire

 

Gilles Chambon, Magie noire, huile sur toile 65 x 50 cm, 2021

Ce tableau montre la pythonisse d’Endor et le fantôme du roi Samuel qu’elle a fait apparaître à la demande du roi Saül (Bible, 1er Livre de Samuel, chapitre 28:3–25) ; les figures sont empruntées à une toile de Salvatore Rosa représentant cette scène : L'ombre de Samuel apparaissant à Saül chez la pythonisse d'Endor - 1668, 2,23 cm x 1,93 cm, Louvre. Les protagonistes sont ici mêlées synchronistiquement avec un tableau abstrait d’Albert Bitran (1928-2018) : Composition sur fond beige - gouache sur carton 61 x 47 cm.

 

La nécromancie est, au moins depuis trois mille ans, une spécialité des sorcières. Sous le patronage de la déesse Hécate, elles transgressent l’ordre naturel pour faire communiquer les morts avec le monde des vivants.

 

Mettre en relation des mondes irrémédiablement séparés est aussi ce que fait la peinture synchronistique : elle transgresse les codes de la création picturale pour mettre en synergie des personnalités et des imaginaires séparés par le temps.

mardi, mai 04, 2021

Le pouvoir ne se partage pas

 

Gilles Chambon, "Le pouvoir ne se partage pas", huile sur toile 45 x 60 cm, 2021

« Le pouvoir ne se partage pas ». C’est le précepte qu’aurait suivi Romulus en tuant son jumeau Rémus, lors de la fondation de Rome. 

 

Cela évoque tous les meurtres accomplis depuis, et dans tous les continents, pour écarter ceux qui menacent celui qui prétend au pouvoir, ou qui le détient déjà. 

 

Mais on peut aussi y voir la réminiscence de l’ancien rituel des rois sacrés, décrit par James G. Frazer et par Robert Graves. Trace d'un matriarcat originaire, prédominant en Europe et en Asie à époque préhistorique, ce rituel aurait été lié au culte d'une déesse-mère chtonienne, avec élection d'un éphémère roi sacré, sacrifié au moment de l’année déclinante et remplacé chaque saison par son alter-ego.

 

C’est peut-être la raison qui fait que le thème de l’affrontement gémellaire se rencontre dans beaucoup de mythologies et cosmogonies indo-européennes et moyen-orientales :

 

-       Chez les Celtes, la lutte de Gwyn et Gwythur pour la main de Creiddylad (mythe que reprend Shakespeare dans Le roi Lear).

-       En Inde la lutte de Sundas et Upasundas pour la belle Tilottomâ.

-       En Islande celle de Cormac et de Corc Ouibne.

-       En Iran celle de Ohrmazd et Ahriman et celle de Aexsaert qui est tué par Aexaertaeg.

-       Chez les Egyptiens, le meurtre d’Osiris par son frère jumeau Set.

-       Dans le récit biblique : Caïn et Abel, Esaü et Jacob, mais aussi la querelle sur la préséance de Pérèc (la brèche) ou de Zérah (le fil écarlate) [neveu de Joseph, fils de Juda].

-       La même problématique est exprimée sur un mode métaphorique dans le Nouveau Testament avec la parabole de l’enfant prodigue.

 

De nombreux autres exemples pourraient aussi être trouvés dans les mythologies ou cosmogonies africaines et sud-américaines.

 

Ce tableau symbolise donc l’acte de violence initiale, envers soi-même ou son double, qui préside à toute fondation et à tout renouvellement. Il associe synchronistiquement un tableau de Vuillard (La boîte à ouvrage) que j’ai fortement détourné, avec des personnages de Georges Moreau de Tours (1848-1901) et d’un dessinateur anonyme du XVIIIe s.