Gilles Chambon, Le rêve de la femme-objet, huile sur toile 145 x 95 cm, 2021 |
Le rêve de la femme-objet est le premier panneau d’un triptyque qui s’intitulera « la nuit recouvrant le monde ».
Pendant la nuit, rêves, songes, ou cauchemars viennent assaillir notre esprit endormi. Ils ont un côté terrible parce qu’ils sont destructurés, et donc toujours ambivalents. Ils mélangent de façon inextricable désirs, craintes, souvenirs, prémonitions, mensonges, et illusions. Et lorsqu’on en tire un fil pour tenter de percer leur mystère, on ne sait jamais quel verdict va tomber. L’avantage du peintre qui s’empare des sujets oniriques, c’est qu’il peut préserver l’ambivalence et la polysémie. Le rêve de la femme-objet est-il une allusion à la création d’Eve à partir d’une côte d’Adam, initiant la vision patriarcale du monde ? Ou désigne-t-il la corruption de l’âme par l’argent ?
Quoi qu’il en soit, à l’image de nos rêves, ce tableau est composé d’éléments picturaux disparates et agrégés suivant la mécanique mystérieuse de l’imaginaire (synchronicité). La femme représentée est la reprise d’une interprétation de la Vénus anadyomène de Botticelli qu’a imaginé le graphiste polonais Tomek Karelus ("bad dream Mr Botticelli"). L’autre personnage est repris d’un dessin d’étude pour Dieu le père, que Raphaël fit en 1515. La cible et le dollar viennent d’un de mes propres tableaux ("la mathématique du plaisir", 2014). Quant au paysage, il réinterprète une œuvre de Zao Wou-Ki, dans laquelle surgit une ville imaginaire inspirée des lointains de Patinir.