présentation des peintures synchronistiques

mercredi, février 29, 2012

THE ARTIST

Bérénice Béjo dans une scène de "The Artist"

Voilà un film qui, je pense, a mérité sa kyrielle d’Oscars, parce qu’il marque un jalon dans l’histoire de la création artistique au cinéma (le cinéma étant bien sûr l’art figuratif par excellence !). 
On pourrait ne voir dans « The Artist » qu’un habile pastiche des films muets des années 20, avec cette particularité toutefois que son sujet est l’histoire même de ce qu’il pastiche. 

Mais ce n’est pas un pastiche ; c’est beaucoup mieux que cela : c’est une écriture « à la manière de », qui base toute sa poésie sur l’effet du décalage temporel, sur la profondeur et l’acuité nouvelles que produit ce décalage. C’est finalement une façon de libérer l’art des barrières du temps, et aussi, dans le cas présent, de celles de la langue. 
Regarder le passé ne se réduit pas dans « The Artist » à le raconter, comme dans n’importe quel film historique, mais plutôt à le revivre, à le mimer en essayant de comprendre en quoi il résonne avec notre présent, en quoi il peut encore le féconder. 

Il montre entre autres que la technologie numérique sophistiquée d’aujourd’hui, au service de l’image, n’a pas pour seule finalité de permettre toujours plus de couleurs et plus de relief, mais peut aussi servir à perfectionner n’importe quel type d’expressivité, que celle-ci soit née hier ou il y a plus de cent ans, comme par exemple l’image noir et blanc.

L’histoire même que raconte le film est une parabole de cette philosophie de l’art : l’acteur du muet, exclu de la scène à la fin des années 20 pour cause de progrès lié à la prise de son et donc au parlant (son expressivité propre d'acteur muet étant alors considérée comme désuète et périmée), finit par retrouver une place innovante grâce aux claquettes. Et que sont les claquettes, sinon un art qui réconcilie l’utilisation du son et l’expressivité du « sans parole » ? 

Les artistes plasticiens contemporains devraient méditer cela, et par analogie, se demander si l’art du pinceau de nos maîtres anciens n’a pas un autre avenir que celui de remplir les musées, comme témoignage d’une expressivité artistique révolue ? Peut-être les peintres-poètes de demain sauront-ils faire revivre cet art figuratif d’avant la photographie, en reconquérant la maîtrise de sa puissance expressive et en jouant sur la poétique du décalage temporel, à la manière de "The Artist".

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