présentation des peintures synchronistiques

jeudi, février 27, 2025

Une allégorie maritime

 

Gilles Chambon, "Une allégorie maritime", huile sur toile 46 x 61 cm, 2025

Comme le disait la chanson de Renaud, "C'est pas l'homme qui prend la mer, c'est la mer qui prend l'homme"... Elle nous prend par son horizon bleu, par les reflets de ses vagues argentées, par sa profondeur mystérieuse, par son sourd bruissement toujours recommencé, par ses promesses d'un ailleurs plus clément, et par toutes les pêches miraculeuses que ses étranges abysses nous promettent.

 

Mon tableau est une rêverie synchronistique sur cette emprise maritime. Tout s'y transforme, les barques de Monet en mains douloureuses, inspirées de van Dongen, et la montagne en une pieuvre rampante, sortie d'une encyclopédie.

Mais pas d'allégorie maritime sans une sirène ! La mienne vient tout droit d'un tableau de Herbert Draper (1863–1920) où elle tentait en vain Ulysse.

mardi, janvier 28, 2025

Jour de tempête

 

Gilles Chambon, "Jour de tempête", huile sur toile 46 x 61 cm, 2025

Tempestas, la tempête, vient du latin tempus qui veut dire le temps. Pas seulement le temps qu'il fait, mais le temps qui passe. Alors les jours de tempête, au sens large, sont ces jours violents où tout bascule, où les éléments se déchaînent avant que puisse renaître le temps plus calme d'un jour nouveau. La tempête renvoie à tous les cataclysmes, au déluge, et aux mondes engloutis, comme la mythique Atlantide... 

 

Cette peinture synchronistique rappelle quelques fragments de mes anciens tableaux de villes imaginaires, et les associe à une aquarelle de Jean Miotte (1926-2016), détournée et basculée.

mardi, janvier 21, 2025

Le chœur des Muses

 

Gilles Chambon, Le chœur des Muses, huile sur toile 120 x 150 cm, 2025

Les neuf Muses sont depuis l'Antiquité le symbole de l'art et de la poésie, de la beauté et de l'harmonie... J'ai voulu en donner une représentation s'appuyant sur la tradition picturale occidentale (n'oublions pas que les Muses sont filles de Mnémosyne, déesse de la mémoire), mais inscrite aussi dans le temps présent ; elles sont certes inspirées de cinq tableaux d'Eustache Le Sueur (1617-1655), mais elles ont les visages des icônes d'aujourd'hui. Ainsi dans la partie gauche du tableau :

 

– Calliope, allouée à la poésie épique, a des airs de Julia Roberts

– Melpomène, Muse de la tragédie, ressemble fort à Juliette Binoche

– Érato, qui préside au chœur lyrique, fait penser à Barbara

– Polymnie, dédiée à la poésie, en jouant de la viole de gambe, évoque Laetitia Casta...

 

Au centre Terpsichore, Muse de la danse, est sans conteste la vedette du tableau, même si son visage est moins connu que les autres... C'est celui de ma nièce Annabelle Chambon, danseuse magnifique, depuis vingt-cinq ans dans la troupe de Jan Fabre !

 

Dans la partie droite de la peinture :

 

– Uranie, Muse de l'astronomie, a le visage de Rosamund Pike

– Euterpe, qui commande la musique, joue ici de la flute ; elle a les traits de Scarlett Johansson

– Quant à Thalie, Muse de la comédie, on dirait un peu Cécile de France

– Et enfin Clio, Muse de l'histoire, évoque la belle Sandra Bullock.

 

La réunion des Muses se déroule sur le mont Hélicon, que j'ai synchronistiquement composé en m'inspirant d'une toile du paysagiste abstrait François Baron-Renouard (1918-2009) et d'un sanctuaire (le Muséion) transposé d'un fragment d'œuvre de Chirico. Et bien sûr Terpsichore, avec son triangle, donne la mesure aux danseuses de Matisse !

lundi, janvier 06, 2025

Dieu est mort, même s'il bouge encore

 


Dieu est un mot, qui désigne dans l'ensemble des cultures humaines une conscience supérieure influençant de manière plus ou moins absolue le cours des événements, jusqu'à être présentée dans les monothéismes comme l'origine et la finalité de tout ce que nous percevons (la création). Cette conscience supérieure, qui voit tout et entend tout, est dépositaire de ce qu'on appelle le Bien, et qui est l'ensemble des comportements et des êtres considérés par les hommes comme bénéfiques à leur évolution. Dans le polythéisme, plusieurs consciences supérieures se partagent l'organisation du monde, et elles recherchent ce qui est bénéfique pour elles et ce qui dépend d'elles dans le monde, les hommes devant les satisfaire pour ne pas attirer leur courroux.

Face à Dieu, le Diable désigne une autre conscience supérieure antithétique, qui est comme l'ombre de la première, et qui est réputée chercher systématiquement à corrompre et détourner les êtres de la recherche du bien collectif vers lequel ils doivent tendre.

Au stade de développement où est arrivée aujourd'hui la conscience humaine, la croyance religieuse, la foi, pose plusieurs questions.

1/ Existe-t-il dans l'univers une ou des consciences supérieures capables d'influer sur notre vie et notre existence, sans qu'aucun signe de leur présence ne soit perceptible objectivement ?

2/ Si elles existent, que signifie pour elle/elles la recherche du bien : ce qui lui/leur bénéficie, ce qui bénéficie à l'évolution générale de l'univers sous leur influence, ce qui bénéficie à l'ensemble des êtres terrestres dotés d'une conscience, ou ce qui bénéficie à la seule communauté des humains ?

3/ Notre conscience individuelle est-elle capable de savoir ce qui bénéficie à l'évolution générale de l'univers, ou même à l'ensemble des êtres terrestres dotés d'une conscience ?

4/ N'y a-t-il pas des cas de figures envisageables, où la pérennité de l'espèce humaine pourrait nuire à l'évolution générale de l'univers telle que recherchée par la/les consciences supérieures ?

5/ Plusieurs consciences supérieures peuvent-elles s'affronter (à l'image des consciences humaines) et rechercher pour l'évolution de l'univers des chemins différents ?

Comme personne ne peut répondre rationnellement à ces questions, la foi n'est-elle pas juste un aveuglement qui permet de justifier des valeurs morales collectives ? Les convictions religieuses devraient donc aujourd'hui être dépassées, et ne plus avoir aucune influence sur le développement des consciences.

Si le bien et le mal ne relèvent plus de la religion, de quelles valeurs morales collectives peuvent-ils découler ? Tout le monde sait que ce sont les idéologies (appuyées ou non sur les religions) qui dictent les valeurs morales du monde contemporain. Elles se prétendent toutes humanistes, allant de la formule un tantinet partisane de Benoît XVI "une morale et une justice qui ne font pas référence à Dieu dégradent l'homme, parce qu'elles le privent de sa mesure la plus exigeante, de ses possibilités les plus hautes" à celle un peu hypocrite de Deleuze “Être de gauche c’est d’abord penser le monde, puis son pays, puis ses proches, puis soi ; être de droite c’est l’inverse” en passant par celle déstabilisante d'Amélie Nothomb “Le sens moral disparaît au-delà de 180 de quotient intellectuel. 

Disons que la morale humaniste de notre siècle se veut exempte d'égoïsme, c'est-à-dire qu'elle nous demande de traiter de la même façon ceux qui nous sont antipathiques, sympathiques, indifférents, proches, ou lointains... Donc contrairement à la morale religieuse, elle ne nous demande pas d'aimer ou de haïr, mais de respecter les autres dans la sphère la plus large possible (incluant pour certains les animaux ­– qui ont comme nous une conscience – et pour les écologistes la nature entière)... Mais c'est là un vœu pieu, car quand on élargit trop, la vie nous confronte à des situations où il faut choisir qui on respecte le plus ! Et dans ces choix difficiles, admettons, au regard de l'histoire, que la religion est une fort mauvaise conseillère morale.

Mais revenons à la mort de Dieu. On peut se libérer des œillères de la foi sans pour autant tomber dans les travers d'un athéisme basique. En effet, il semble logique de penser que le niveau de conscience des homo-sapiens modernes, rapporté à la globalité de l'univers physique perceptible, n'est pas la forme la plus évoluée possible de la conscience, et qu'il existe ailleurs, apparues sur d'autres mondes, des consciences beaucoup plus abouties. Et il ne semble pas inimaginable que de telles consciences puissent avoir un impact sur l'humanité terrestre, comme nous même en avons un par exemple sur les végétaux, qui sont incapables de nous percevoir directement, la conscience végétale étant à un stade d'évolution plus rudimentaire.

Au-delà de ça, ne peut-on pas faire l'hypothèse que la conscience est une forme d'énergie intrinsèque au Réel, indissociable du sens même que l'on peut Lui attribuer... On se trouve alors conduit vers la notion de Transcendance, qui pallie au handicap insurmontable qu'aura toujours la connaissance scientifique, malgré ses fantastiques progrès, pour comprendre le réel et l'imaginaire, l'être et le néant, l'existence et la disparition, l'espace et le temps... Mais pour bien gérer les intuitions que nous inspire cette Transcendance des choses, il vaut mieux, me semble-t-il, s'en remettre à la poésie, sous toutes ses formes, plutôt qu'à la foi.


mardi, décembre 31, 2024

Apollon et Hyacinthe

Gilles Chambon, Apollon et Yacinthe, huile sur toile 50x61cm, 2024

 

Souvent dans la mythologie gréco-romaine, les héros au destin malheureux se métamorphosent en éléments naturels, qui en fleuve comme Acis, qui en arbre comme Daphné, ou encore en fleur comme Narcisse. Ces légendes, que l'on pourrait dire "écologiques", nous rappellent que la nature se nourrit toujours des morts qu'elle recycle éternellement. Et mes peintures synchronistiques font de même en se nourrissant des œuvres du passé !

 

En ce qui concerne Hyacinthe, le beau guerrier spartiate tué accidentellement par son amant Apollon lors d'un lancer de disque, c'est la fleur de jacinthe qui est née de son sang répandu.

 

Dans ma peinture, Apollon est l'avatar d'un portrait féminin du Fayoum, tandis que la dépouille de Hyacinthe est transposée d'une sculpture baroque représentant St Sébastien (Antonio Giorgetti, 1635-1669). La jacinthe aussi est reprise d'une peinture de Wladyslaw Slewinski (1856-1918). Quant au reste du tableau, les yeux avisés y découvriront peut-être quelques affinités avec une nature morte du peintre Giuseppe Ajmone (1923-2005).

lundi, décembre 02, 2024

Une transverbération ambivalente

Gilles Chambon, Une transverbération ambivalente, huile sur toile 48 x 42 cm, 2024

 

On connaît la sculpture du Bernin représentant la transverbération de Sainte Thérèse d'Avila, dont l'ambivalence avait fait dire à Charles de Brosse " Si c'est ici l'amour divin, je le connais ; on en voit ici-bas maintes copies d'après nature"... Entre l'effusion de l'amour mystique et l'érotisme de l'amour terrestre, il y a donc à la fois une convergence et un combat : c'est que l'amour humain oscille toujours entre le Diable et le bon Dieu, entre le plaisir personnel et le don de soi. Pour certains la séduction, arme du Diable, doit être voilée, tandis que pour d'autres, elle est au contraire la manifestation de l'harmonie universelle qui concilie plaisir et don...

 

J'ai choisi dans ce tableau d'exprimer cette ambivalence par la transformation du voile en chevelure, et par la superposition de formes pointues et de couleurs chaleureuses. Pour l'occasion, j'ai un peu tordu les formes d'une œuvre d'Albert Gleizes, et le visage d'une sainte de l'école lombarde du XVIe siècle.
 


 

vendredi, novembre 22, 2024

Hymne à la maternité

 

Gilles Chambon, Hymne à la maternité, huile sur toile 56 x 81cm, 2024

Depuis la nuit des temps, la vie se transmet, chez les mammifères, par un acte d'amour que le corps des créatures femelles est seul capable de transformer en une vie nouvelle. Cela est un merveilleux mystère, une magie faite d'attention, de douceur, et d'espoir. 

 

Le corps de la femme et celui de l'enfant, d'abord fusionnels pendant neuf mois, restent encore physiquement reliés après la naissance, par l'allaitement. Mais si le lait maternel permet au bébé de grandir, c'est bien sûr l'amour et la tendresse de sa mère qui l'arment pour affronter le monde. 

 

J'ai tenté dans ce tableau d'exprimer la beauté calme et intemporelle des mères aimantes avec leur bébé. Je les ai imaginées à partir de celles d'Anto Carte (1886-1954) et de Jean Souverbie (1891-1981), synchronistiquement associées à un paysage évanescent interprété d'une composition abstraite de Gérard Anezin (1948-2000).

mardi, novembre 12, 2024

Don Quichotte, la quête illusoire

 

Gilles Chambon, "Don Quichotte, la quête illusoire", huile sur toile 38 x 61 cm, 2024

Don Quichotte et Sancho Pança personnifient la quête illusoire d'aventures, de vérité, et de justice qui anime les âmes rêveuses, et leur fait souvent perdre le sens des réalités.

 

Leurs silhouettes opposées ont été imaginées par de nombreux peintres, parmi lesquels Fragonard, Goya, Delacroix, Gustave Doré, Daumier, Cézanne, Dali, Picasso, Masson, Hopper, etc... Mais c'est sans conteste les peintures d'Honoré Daumier qui ont fixé le stéréotype le plus actif dans notre mémoire collective.

 

C'est donc de lui que j'ai repris les personnages de mon tableau synchronistique. Et le moulin à vent qu'ils prennent pour un géant et s'apprêtent à combattre, est emprunté à Van Gogh. Mais il était important que la scène se déroule dans un paysage à même de générer des mirages. J'en ai donc composé un en interprétant une toile abstraite d'André Lanskoy, pour en extraire une virtualité figurative ; exactement comme de tout paysage réel, on peut faire surgir le mirage qui correspond le mieux à notre quête.

samedi, novembre 02, 2024

L'arbre de vie

 

Gilles Chambon, "Auprès de l'arbre de vie", huile sur toile 75 x 52 cm, 2024

L'arbre de vie, ou arbre cosmique, est un symbole universel que l'on retrouve dans toutes les traditions mythologiques, depuis le "pilier Djed" (arbre-monde) en Egypte, jusqu'à Yggdrasil chez les Vikings, en passant par l'"arbre de vie" du paradis dans la tradition judéo-chrétienne, et sans oublier tous les autres : le "Kien Mou" chinois, le "KisKanu" mésopotamien, le chêne oraculaire grec, l'arbre cosmique des chamans, etc...

Plus près de nous, Georges Brassens a aussi rappellé, dans sa célèbre chanson, qu'il ne faut jamais s'éloigner de son arbre !

 

Donc l'arbre de vie nous protège, et connecte le monde d'en haut avec le monde d'en bas ; il est l'arbre généalogique qui relie les générations, l'axe du monde autour duquel gravitent toutes les sociétés humaines. 

 

Dans ma peinture, j'ai emprunté cet arbre à Van Gogh, et je lui ai fixé pour tâche accessoire (et synchronistique) de relier deux peintres que j'aime : Christine Boumeester (1904-1971) et André Maire (1898-1984).

jeudi, octobre 03, 2024

Charybde et Scylla

Gilles Chambon, Charybde et Scylla, huile sur toile 50 x 65 cm, 2024


Charybde et Scylla personnifient deux grandes angoisses des navigateurs du monde antique : les maelströms et les récifs, qui pouvaient entraîner les pires naufrages... Alessandro Allori les a représentés au plafond du palais Portinari Salviati (Florence), dont les fresques illustrent l'Odyssée. Le navire d'Ulysse échappe à Charybde, énorme gueule vomissant des flots déchaînés, mais Scylla, représenté par un monstrueux chien à cinq têtes, dévore six de ses compagnons. 

Je lui ai emprunté ces deux monstres, ainsi qu'une barque et des sirènes issus de son tableau "Les pêcheurs de perles" (Palazzo Vecchio). Le tout s'intègre dans une composition abstraite d'Oliver Debré, que j'ai renversée et modifiée pour en faire un signe paysage, selon la dénomination qu'aimait employer le peintre lui-même.  

Quant à la signification de ma peinture, elle est facile à décrypter : toutes nos joies sont embarquées sur un frêle esquif qui doit slalomer entre les multiples dangers auxquels nous confronte l'existence. Ces joies sont parfois dévorées par les malheurs, mais peuvent aussi être renforcées par les perles imprévues que nous offre la vie.


mardi, septembre 24, 2024

L'esprit des générations à venir

 


Les générations qui viennent vont avoir une construction psychique très différente de la nôtre. En effet, la mémoire virtuelle, celle des disques durs qui conservent tout : images de leur enfance, images de leurs parents et grands-parents dans leurs contextes familiaux, sociaux, professionnels, avec toutes les reconstitutions et renseignements les rendant aussi présents dans leur représentation mentale que les parents et amis directs avec lesquels ils vivent...

 

Toute l'histoire récente (et plus tard tout ce qui ne sera pas préhistoire d'avant l'IA) devient rémanente, elle ne s'évapore plus peu à peu comme c'était le cas pour nous. Pour nous seuls restaient présents dans la mémoire les faits importants, les autres disparaissaient pour toujours, et sollicitaient l'imagination pour leur réinvention.

 

Nos chers descendants n'auront plus ce souci, ce plaisir ou cette peine. Ils n'auront plus besoin non plus de faire des choses extraordinaires pour rester gravés dans les mémoires. Il y aura une forme d'éternel retour nietzschéen, l'espace et le temps des autres sera toujours convocable à tout moment dans le présent de chacun. Je ne sais quelle forme d'esprit cela va donner, mais probablement très différents des nôtres. L'oubli est l'envers de la mémoire, et tous deux sont les faces janusiennes de l'imagination.

 

Dans la nouvelle psyché cependant, l'imagination ne disparaîtra pas : mais le facteur "oubli" sera remplacé par le facteur "choix" ; en effet, la mémoire tendant vers l'infini, c'est le choix parmi ses éléments qui forgera la forme d'imagination des générations futures. La différence est importante car la conscience de l'oubli s'accompagne toujours de nostalgie/mélancolie, tandis que la conscience du choix, elle, s'accompagne de doute.

 

Je ne sais donc ce que tout cela donnera... j'espère seulement que la poésie restera une clef de voûte dans l'expression de l'être.

dimanche, septembre 15, 2024

Le jugement de Pâris


Gilles Chambon, "Le jugement de Pâris", huile sur toile  66 x 120 cm, 2024
 

Tout le monde connaît la légende : Eris, déesse de la discorde, a promis une pomme d'or à la plus belle des déesses, et c'est Pâris, le prince troyen qui garde les moutons sur le mont Ida, qui est choisi par Zeus pour juger laquelle des trois postulantes Héra, Athéna, et Aphrodite doit remporter le titre. Jugement pipé puisque chacune l'a soudoyé en lui promettant l'une le pouvoir sur tous les hommes, l'autre la victoire à tous les combats, et la dernière, l'amour d'Hélène, la plus belle des mortelles. C'est évidemment Aphrodite qui est désignée par le jouvenceau : et conformément à sa promesse, elle permettra à Pâris d'enlever la belle Hélène, provocant la terrible guerre de Troie.

 

Les pommes ont toujours joué un rôle important dans l'imaginaire occidental : pommes tentatrice d'Adam et Ève entraînant leur éviction du paradis, pommes d'or du jardin des Hespérides dérobées par Héraclès puis restituées grâce à Athéna, pomme de discorde lancée par Éris, pomme de danger, visée par par Guillaume Tell sur la tête de son fils... auxquelles il faut ajouter la pomme d'amour entourée de sucre rouge, inventée vers 1900, et les fameuses pommes de Cézanne dont il dira, en faisant un clin d'œil au jugement de Pâris : "Avec une pomme, je veux étonner Paris !".

 

Pour mon "jugement de Pâris", synchronistique comme il se doit, j'ai donc emprunté trois pommes à Cézanne, et les ai placées sur la tête des déesses, incarnées par "trois femmes nues" (August Macke). Tel Guillaume Tell, un petit Cupidon, inspiré de Raphaël, aide Pâris à se décider, en visant l'une d'entre elles, qui sera forcément la pomme d'amour ! J'ai remplacé le mont Ida par un décor abstrait interprété d'une composition de Pierre Pen-Koat (né en 1945). Quant à Pâris, il fait directement référence au tableau de Nicolas Poussin sur ce thème.


jeudi, août 29, 2024

La conjonction de Vénus et de Vesta

 

Gilles Chambon, la conjonction de Vénus et de Vesta, huile sur toile 54 x 65 cm, 2024

La planète Vénus et l'astéroïde Vesta seront alignées dans le ciel, en conjonction, le 3 septembre 2024. Les déesses Vénus et Vesta représentent deux aspects diamétralement opposés de la féminité : Vénus personnifie la sensualité érotique, tandis que Vesta, déesse du foyer, incarne la bienveillance maternelle. Leur conjonction témoigne du mystère essentiel de la double nature féminine, et de la coexistence indispensable de ces deux qualités, que d'aucuns voudraient séparer.

 

Cette peinture synchronistique est donc un éloge de la conjonction paradoxale : Vénus et Vesta sont personnifiées par deux silhouettes d'Henry Moore (1898-1986), dans un décor où les univers de juan Gris (1887-1927) et d'Hubert Robert (1733-1808) paraissent inextricablement mêlés... La conjonction des deux astres, elle, est bien sûr inspirée des étoiles de Van Gogh (1853-1890).

samedi, août 17, 2024

C'est la lutte finale

 

Gilles Chambon, "C'est la lutte finale", huile sur toile 50 x50 cm, 2024

Héraclès terrassant Antée grâce au maintien hors-sol, c'est comme la lutte finale promettant la victoire de l'utopie moderniste sur la tradition. Le fils de Zeus vainc en effet le fils de Gaïa en l'empêchant de se ressourcer au contact de la terre, symbolisant le progrès humain rendu possible par une entrave aux vieilles recettes qui s'ancrent dans la glèbe millénaire.

 

C'est comme en art, où la peinture d'avant-garde du XXe siècle, qui veut faire table rase, asphyxie la représentation académique figurative, et pense l'avoir définitivement tuée. Mais elle-même finit aussi par s'éroder et son dernier avatar, sous le vocable d'art contemporain, se complait dans des procédés encore plus insipides et ressassés que ceux reprochés à l'académisme du XIXe siècle.

 

Alors imaginons que l'étreinte mortelle qu'Héraclès inflige à Antée se transforme miraculeusement en étreinte affectueuse ; que l'avant-garde s'unisse enfin à la tradition... C'est évidemment ce que tente la peinture synchronistique... Et ici, dans ce petit tableau, c'est en mêlant l'"Hercule et Antée"(1475) d'Antonio Pollaiolo, qui appartient à la tradition figurative, avec l'adaptation d'un tableau abstrait d'Albert Gleizes ("composition pour jazz", 1915), pris comme métaphore du combat artistique en marche au début du XXe siècle.

mardi, juillet 16, 2024

Temps et Vérité

Gilles Chambon, Le Temps et la Vérité, huile sur toile 65 x 46 cm, 2024
 

Temps et vérité sont liés : Sénèque disait que "le temps révèle la vérité", et plus tard Johannes Kepler et Francis Bacon utilisèrent la formule : "la vérité est fille du temps". Les artistes se sont abondamment emparés de ses sentences pour créer des allégories anthropomorphes en peinture ou en sculpture. 

Parmi elles, un dessin disparu du Bernin, dont une copie est au musée du Prado, a capté mon attention, et je m'en suis servi pour créer ma propre version de ce dévoilement de la vérité par le temps... 

 

Mais curieusement je ne suis pas sûr de la vérité de cette déclaration, le temps pouvant aussi brouiller les pistes, et instiller le doute. Comme ma peinture synchronistique brouille les pistes en mélangeant les temps... Toutefois, pour ceux qui veulent la vérité sur ce tableau, il associe au dessin de Bernin du XVIIe s., une composition abstraite du XXe s., due à d'Albert Gleizes, dans laquelle s'incruste une horloge empruntée à Giorgio de Chirico.

vendredi, juin 28, 2024

Les pensées d'Arlequin

Gilles Chambon, Les pensées d'Arlequin, huile sur toile 44 x 50 cm, 2024

Arlequin est un personnage familier de la commedia dell'arte, dont l'origine pourrait remonter aux mimes des certains spectacles ambulants dans la république romaine... 

 

Comme son costume, il a de multiples facettes, incarnant divers sentiments et attitudes avec humour, de façon kaléidoscopique, entre naïveté et roublardise. Watteau, Cézanne, et plus près de nous Picasso et les peintres de la première moitié du XXe s. lui ont rendu de beaux hommages.


Dans cette peinture synchronistique qui s'amuse à rêver sur l'ambivalence et l'humour d'Arlequin, j'ai détourné un dessin d'Edgar Scauflaire ("Portrait d’arlequin" 1938), et je l'ai placé dans un décor fait de facettes de couleurs, dérivé d'une peinture contemporaine (Jahb, "Matin d'été"). Ses pensées sont matérialisées par les célèbres "Petits Pois Sont Verts, Petits Poissons Rouges..." de Yves Laloy (1959, musée des Beaux-Arts de Rennes).

vendredi, juin 21, 2024

Un autoportrait au luth

 

Gilles Chambon, "autoportrait synchronistique au luth", huile sur toile 46 x 65 cm, 2024

Les portraits de personnages jouant du luth sont très nombreux au XVIe et surtout au XVIIe siècle... Le Caravage, Artemisia Gentileschi, Frans Hals, Hendrick Jansz Terbrugghen, Simon Vouet, et des dizaines d'autres peintres. Au XXe siècle, depuis le "vieux guitariste aveugle" de Picasso (1904), beaucoup de peintres, notamment cubistes, ont intégré guitare et parfois luth dans leurs compositions... 

Mon nouvel autoportrait synchronistique lève donc son verre pour rendre hommage à cette tradition, en s'appuyant sur un "joueur de luth tenant un verre de vin" de Frans Hals (1625-26), et sur une peinture de Louis Marcoussis ("nature morte devant un balcon" vers 1930) librement recomposée.

vendredi, juin 14, 2024

Découper les rêves

 

Gilles Chambon, "Rêverie découpée", huile sur toile 54 x 73 cm, 2024

Pendant le sommeil, les rêves découpent notre passé pour recomposer des histoires bizarres et mystérieuses... un peu comme les enfants qui découpent leurs revues pour inventer de nouvelles configurations. Les surréalistes, et particulièrement Max Ernst, faisaient ça aussi.

 

Dans cette peinture synchronistique, j'ai représenté ma fille aînée endormie pendant que son fils prépare un collage, sur un fond tiré d'une composition de Georges Valmier, qui est elle-même un collage papier avec gouache et encre ("Fugue", 1920, Guggenheim Museum). Ajoutons que G. Valmier est né en 1885 à Angoulême, là où habite aujourd'hui ma fille et ses enfants ! Clin d'œil synchronistique !

jeudi, mai 23, 2024

Face à face, jeunesse et vieillesse

 

Gilles Chambon, "Avant et après, tôt ou tard", huile sur toile 50 x 65cm, 2024

La jeunesse et la vieillesse se regardent, mais le gouffre de la vie les sépare. 

 

Dans ce tableau synchronistique, la jeunesse est incarnée par une fille nue issue d'une de mes anciennes toiles représentant Vénus, et la vieillesse par la réinterprétation d'un croquis aquarellé de Van Gogh (musée Van Gogh, Amsterdam). Quant au monde interposé entre elles deux, il est construit sur la fusion de deux œuvres, l'une de Serge Charchoune (1888-1975) et l'autre de Christine Boumeester (1904-1971).

lundi, mai 13, 2024

Chevalier contre dragon

 

Gilles Chambon, Chevalier contre dragon, huile sur toile 46 x 61 cm, 2024

Le combat du chevalier et du dragon est un des thèmes les plus répandus dans l'imaginaire universel. En Occident, on le retrouve dans le combat de Saint Michel contre Satan, et de Saint Georges contre le dragon (lui-même reprenant l'image égyptienne d'Horus terrassant Seth). On le voit aussi dans la légende nordique de Sigurd-Siegfried tuant Fafnir, ou dans la mythologie hindoue où Indra tue Vritra...

 

Les significations symboliques de ce conte sont multiples, mais j'y vois personnellement une métaphore du combat de la civilisation contre la barbarie, dont malheureusement le XXIe siècle nous rappelle chaque jour l'actualité.

 

Cette peinture synchronistique réinterprète le St Georges et le dragon de Vittore Carpaccio, avec deux édifices empruntés à Giogio de Chirico pour exprimer les règles civilisatrices, qui apportent la stabilité figurative à un environnement pictural abstrait. Celui-ci est inspiré d'une peinture de Giuseppe Ajmone, et est en train de se transformer en vrai paysage, entérinant la victoire du chevalier civilisateur.

vendredi, mai 03, 2024

Une vie pèse lourd

 

Gilles Chambon, "Une vie pèse lourd", huile sur toile 61 x 52 cm, 2024

La vie de chaque être humain est inconsciemment portée par ses superstitions et par ses rêves. Le poids des années alourdi la charge, les superstitions s'affaiblissent, et les rêves s'évaporent peu à peu...

 

Pour exprimer cette fatalité douloureuse, j'ai synchronistiquement eu recours au "vol des sorcières" de Francisco Goya, planant dans un désordre abstrait inspiré de Giuseppe Ajmone ("Tempête", 1958), et d'où émerge quelques fragments d'une rêverie architecturale du védutiste  Apollonio Domenichini (XVIIIe s., Venise).

samedi, avril 20, 2024

Descente de croix

Gilles Chambon, Descente de croix, huile sur toile 60 x 81 cm, 2024
 

La treizième station du Chemin de croix est la descente de croix, où Joseph d’Arimathie et Nicodème détachent et déposent le corps de Jésus.

 

Fin d'une épopée, et lamentations crépusculaires, avant que l'espoir ne renaisse par la résurrection. Dans ce monde qui vient de perdre son dieu et qui n'a pas encore les éléments pour croire en une vie nouvelle, tout se délite et se mélange, les visages et les paysages ont perdus leurs traits expressifs.

C'est comme une terre qui se ravine sous la pluie avant que les graines enfouies ne germent et lui redonnent sa beauté.

 

Pour exprimer cette dissolution des figures, j'ai intégré synchronistiquement un fragment de descente de croix de Luca Cambiaso (sanguine - on pourrait le dire précurseur du cubisme, dans la mesure où les personnages de ses esquisses ont des têtes cubiques sans faciès !) dans un mélange fait de morceaux inspirés de Georges Braque (Violon et chandelier, 1910) et de Geer Van Velde (Composition, circa 1966).