présentation des peintures synchronistiques

vendredi, avril 11, 2025

Le principe d'incertitude

 

Gilles Chambon, Le principe d'incertitude, huile sur toile 52 x 75 cm, 2025

Une femme au saut du lit se questionne sur son désir et le compare aux propriétés de la physique quantique : à la fois présent et absent (superposition d'états), en même temps orienté dans un sens et dans l'autre... les deux hommes – l'un la tête vers le bas et l'autre vers le haut – pouvant symboliser les valeurs possibles du spin attribué à chaque particule quantique.

 

Ainsi si le désir masculin s'apparente à la physique classique, peut-être que le désir féminin suit le modèle de la physique quantique...

 

J'ai tenté dans ce tableau l'intrication (quantique) d'une femme (Madeleine) de Lotte Laserstein (1898 – 1993), de deux nus masculins ("Hector", de jacques-Louis David, et "jeune homme assis" de Camille Corot). Quant à l'espace pictural dans lequel ils sont réunis, inspiré de Braque, il figure le caractère indécidable, à la fois ondulatoire et particulaire, de la réalité quantique.

jeudi, avril 03, 2025

Le rapt de Proserpine

 

Gilles Chambon, Le rapt de Proserpine, huile sur toile 45 x 55 cm, 2025

Près de l'Etna, Pluton jadis enleva Proserpine, fille de Déméter, pour l'épouser en enfer. Sa disparition de la surface terrestre engendra aussitôt la fin de la végétation. Alors les dieux lui permirent de revenir auprès de sa mère pendant huit mois de l'année, et de ne rester que quatre mois dans le royaume des ombres. Et chaque année cette sombre période est marquée par l'hiver, où les arbres semblent mourir, pour ne renaître qu'au printemps, avec les fleurs.

Beaucoup de poètes et de peintres ont raconté cette histoire qui comme les saisons, est peut-être destinée à renaître éternellement sous la plume ou le pinceau.

 

La mienne est synchronistique, inspirée de Claude Weisbuch (1927-2014) et d'Afro Basaldella (1912-1976), avec un petit clin d'œil à Rubens qui avait intégré la déesse Minerve à sa composition.

vendredi, mars 21, 2025

Ariane abandonnée

 

Gilles Chambon, Ariane abandonnée, huile sur toile 50 x 73 cm, 2025

Le mythe d'Ariane, fille de Minos et complice amoureuse de Thésée, connaît plusieurs versions. Dans la plus connue, après avoir aidé le héros Athénien à sortir du Labyrinthe où il avait tué le Minotaure, elle quitte Cnossos et part avec lui rejoindre Athènes, où il doit l'épouser. Ils font escale sur l'île de Dia (ou Naxos)... Mais Thésée, sous prétexte de l'approche d'une tempête, l'abandonne et repart sans elle vers Athènes. Ariane sombre alors dans la dépression et plonge dans le sommeil, jusqu'à la mort selon certains, ou, selon d'autres, jusqu'à ce que Dionysos lui fasse oublier Thésée et la prenne pour épouse...

 

Beaucoup de peintres ont représenté Ariane endormie, tantôt avec Dionysos, tantôt seule. La sculpture antique d'Ariane endormie, dont une copie romaine se trouve au Vatican (achetée par le pape en 1521) a notamment beaucoup inspiré Giorgio de Chirico. Pour lui, Ariane endormie est le symbole de la mélancolie, elle "exprime le tempérament saturnien de l’être artiste seul au monde, devant faire face à l’ombre, à la négation, au non-être, à la mort" (Sylvain Foissey).

 

Pour exprimer cette mélancolie et cette solitude intérieure de l'artiste, j'ai choisi d'adapter l'Ariane du "Bacchus découvrant Ariane à Naxos" des frères Le Nain (musée des Beaux-Arts d'Orléans). Je l'ai placée synchronistiquement dans un paysage inventé à partir d'une peinture de Serge Charchoune (1888-1975).

dimanche, mars 16, 2025

La machine à recoudre les rêves

 

Gilles Chambon, La machine à recoudre les rêves, huile sur toile 48 x 80 cm, 2025

Pendant le sommeil, mes rêves s'enchaînent et se déchaînent, dans une succession généralement si décousue qu'il m'est impossible d'en comprendre le sens. Mais un jour, ou plutôt une nuit, la stridulation des grillons s'est mise à envahir mon esprit endormi et a provoqué une vision paradoxale de forme hybride, que j'interprète comme une machine à recoudre les rêves...

 

Cette histoire est bien sûr inventée, mais il n'en est pas moins vrai que dans ma peinture synchronistique – qui rapproche ici des personnages empruntés au peintre britannique William Etty (1787-1849) et une composition inspirée de l'artiste austro-américaine Erika Giovanna Klien (1900-1957) – cette machine hybride m'est soudainement apparue, et m'a permis de comprendre la signification du tableau !

vendredi, mars 07, 2025

L'ivresse du pouvoir

Gilles Chambon, L'ivresse du pouvoir", huile sur toile 75 x 95 cm, 2025

Ce tableau synchronistique est construit à partir du "Silène ivre" de José de Ribera (1626). Le côté décadent, paresseux, et un peu ridicule que Ribera avait donné à son personnage ("Silène est affalé comme une baleine échouée, posant en Vénus obèse"), est ici réaffirmé comme parfait symbole de l'actuel triumvirat américain (Trump, Musk, Vance) ivre de son pouvoir, au point d'en oublier toute décence, et de souiller l'image de l'Amérique.

 Un petit clin d'œil est fait pour l'occasion à Jasper Jones, qui avait pris le drapeau américain comme sujet de plus de 40 toiles.


jeudi, février 27, 2025

Une allégorie maritime

 

Gilles Chambon, "Une allégorie maritime", huile sur toile 46 x 61 cm, 2025

Comme le disait la chanson de Renaud, "C'est pas l'homme qui prend la mer, c'est la mer qui prend l'homme"... Elle nous prend par son horizon bleu, par les reflets de ses vagues argentées, par sa profondeur mystérieuse, par son sourd bruissement toujours recommencé, par ses promesses d'un ailleurs plus clément, et par toutes les pêches miraculeuses que ses étranges abysses nous promettent.

 

Mon tableau est une rêverie synchronistique sur cette emprise maritime. Tout s'y transforme, les barques de Monet en mains douloureuses, inspirées de van Dongen, et la montagne en une pieuvre rampante, sortie d'une encyclopédie.

Mais pas d'allégorie maritime sans une sirène ! La mienne vient tout droit d'un tableau de Herbert Draper (1863–1920) où elle tentait en vain Ulysse.

mardi, janvier 28, 2025

Jour de tempête

 

Gilles Chambon, "Jour de tempête", huile sur toile 46 x 61 cm, 2025

Tempestas, la tempête, vient du latin tempus qui veut dire le temps. Pas seulement le temps qu'il fait, mais le temps qui passe. Alors les jours de tempête, au sens large, sont ces jours violents où tout bascule, où les éléments se déchaînent avant que puisse renaître le temps plus calme d'un jour nouveau. La tempête renvoie à tous les cataclysmes, au déluge, et aux mondes engloutis, comme la mythique Atlantide... 

 

Cette peinture synchronistique rappelle quelques fragments de mes anciens tableaux de villes imaginaires, et les associe à une aquarelle de Jean Miotte (1926-2016), détournée et basculée.

mardi, janvier 21, 2025

Le chœur des Muses

 

Gilles Chambon, Le chœur des Muses, huile sur toile 120 x 150 cm, 2025

Les neuf Muses sont depuis l'Antiquité le symbole de l'art et de la poésie, de la beauté et de l'harmonie... J'ai voulu en donner une représentation s'appuyant sur la tradition picturale occidentale (n'oublions pas que les Muses sont filles de Mnémosyne, déesse de la mémoire), mais inscrite aussi dans le temps présent ; elles sont certes inspirées de cinq tableaux d'Eustache Le Sueur (1617-1655), mais elles ont les visages des icônes d'aujourd'hui. Ainsi dans la partie gauche du tableau :

 

– Calliope, allouée à la poésie épique, a des airs de Julia Roberts

– Melpomène, Muse de la tragédie, ressemble fort à Juliette Binoche

– Érato, qui préside au chœur lyrique, fait penser à Barbara

– Polymnie, dédiée à la poésie, en jouant de la viole de gambe, évoque Laetitia Casta...

 

Au centre Terpsichore, Muse de la danse, est sans conteste la vedette du tableau, même si son visage est moins connu que les autres... C'est celui de ma nièce Annabelle Chambon, danseuse magnifique, depuis vingt-cinq ans dans la troupe de Jan Fabre !

 

Dans la partie droite de la peinture :

 

– Uranie, Muse de l'astronomie, a le visage de Rosamund Pike

– Euterpe, qui commande la musique, joue ici de la flute ; elle a les traits de Scarlett Johansson

– Quant à Thalie, Muse de la comédie, on dirait un peu Cécile de France

– Et enfin Clio, Muse de l'histoire, évoque la belle Sandra Bullock.

 

La réunion des Muses se déroule sur le mont Hélicon, que j'ai synchronistiquement composé en m'inspirant d'une toile du paysagiste abstrait François Baron-Renouard (1918-2009) et d'un sanctuaire (le Muséion) transposé d'un fragment d'œuvre de Chirico. Et bien sûr Terpsichore, avec son triangle, donne la mesure aux danseuses de Matisse !

lundi, janvier 06, 2025

Dieu est mort, même s'il bouge encore

 


Dieu est un mot, qui désigne dans l'ensemble des cultures humaines une conscience supérieure influençant de manière plus ou moins absolue le cours des événements, jusqu'à être présentée dans les monothéismes comme l'origine et la finalité de tout ce que nous percevons (la création). Cette conscience supérieure, qui voit tout et entend tout, est dépositaire de ce qu'on appelle le Bien, et qui est l'ensemble des comportements et des êtres considérés par les hommes comme bénéfiques à leur évolution. Dans le polythéisme, plusieurs consciences supérieures se partagent l'organisation du monde, et elles recherchent ce qui est bénéfique pour elles et ce qui dépend d'elles dans le monde, les hommes devant les satisfaire pour ne pas attirer leur courroux.

Face à Dieu, le Diable désigne une autre conscience supérieure antithétique, qui est comme l'ombre de la première, et qui est réputée chercher systématiquement à corrompre et détourner les êtres de la recherche du bien collectif vers lequel ils doivent tendre.

Au stade de développement où est arrivée aujourd'hui la conscience humaine, la croyance religieuse, la foi, pose plusieurs questions.

1/ Existe-t-il dans l'univers une ou des consciences supérieures capables d'influer sur notre vie et notre existence, sans qu'aucun signe de leur présence ne soit perceptible objectivement ?

2/ Si elles existent, que signifie pour elle/elles la recherche du bien : ce qui lui/leur bénéficie, ce qui bénéficie à l'évolution générale de l'univers sous leur influence, ce qui bénéficie à l'ensemble des êtres terrestres dotés d'une conscience, ou ce qui bénéficie à la seule communauté des humains ?

3/ Notre conscience individuelle est-elle capable de savoir ce qui bénéficie à l'évolution générale de l'univers, ou même à l'ensemble des êtres terrestres dotés d'une conscience ?

4/ N'y a-t-il pas des cas de figures envisageables, où la pérennité de l'espèce humaine pourrait nuire à l'évolution générale de l'univers telle que recherchée par la/les consciences supérieures ?

5/ Plusieurs consciences supérieures peuvent-elles s'affronter (à l'image des consciences humaines) et rechercher pour l'évolution de l'univers des chemins différents ?

Comme personne ne peut répondre rationnellement à ces questions, la foi n'est-elle pas juste un aveuglement qui permet de justifier des valeurs morales collectives ? Les convictions religieuses devraient donc aujourd'hui être dépassées, et ne plus avoir aucune influence sur le développement des consciences.

Si le bien et le mal ne relèvent plus de la religion, de quelles valeurs morales collectives peuvent-ils découler ? Tout le monde sait que ce sont les idéologies (appuyées ou non sur les religions) qui dictent les valeurs morales du monde contemporain. Elles se prétendent toutes humanistes, allant de la formule un tantinet partisane de Benoît XVI "une morale et une justice qui ne font pas référence à Dieu dégradent l'homme, parce qu'elles le privent de sa mesure la plus exigeante, de ses possibilités les plus hautes" à celle un peu hypocrite de Deleuze “Être de gauche c’est d’abord penser le monde, puis son pays, puis ses proches, puis soi ; être de droite c’est l’inverse” en passant par celle déstabilisante d'Amélie Nothomb “Le sens moral disparaît au-delà de 180 de quotient intellectuel. 

Disons que la morale humaniste de notre siècle se veut exempte d'égoïsme, c'est-à-dire qu'elle nous demande de traiter de la même façon ceux qui nous sont antipathiques, sympathiques, indifférents, proches, ou lointains... Donc contrairement à la morale religieuse, elle ne nous demande pas d'aimer ou de haïr, mais de respecter les autres dans la sphère la plus large possible (incluant pour certains les animaux ­– qui ont comme nous une conscience – et pour les écologistes la nature entière)... Mais c'est là un vœu pieu, car quand on élargit trop, la vie nous confronte à des situations où il faut choisir qui on respecte le plus ! Et dans ces choix difficiles, admettons, au regard de l'histoire, que la religion est une fort mauvaise conseillère morale.

Mais revenons à la mort de Dieu. On peut se libérer des œillères de la foi sans pour autant tomber dans les travers d'un athéisme basique. En effet, il semble logique de penser que le niveau de conscience des homo-sapiens modernes, rapporté à la globalité de l'univers physique perceptible, n'est pas la forme la plus évoluée possible de la conscience, et qu'il existe ailleurs, apparues sur d'autres mondes, des consciences beaucoup plus abouties. Et il ne semble pas inimaginable que de telles consciences puissent avoir un impact sur l'humanité terrestre, comme nous même en avons un par exemple sur les végétaux, qui sont incapables de nous percevoir directement, la conscience végétale étant à un stade d'évolution plus rudimentaire.

Au-delà de ça, ne peut-on pas faire l'hypothèse que la conscience est une forme d'énergie intrinsèque au Réel, indissociable du sens même que l'on peut Lui attribuer... On se trouve alors conduit vers la notion de Transcendance, qui pallie au handicap insurmontable qu'aura toujours la connaissance scientifique, malgré ses fantastiques progrès, pour comprendre le réel et l'imaginaire, l'être et le néant, l'existence et la disparition, l'espace et le temps... Mais pour bien gérer les intuitions que nous inspire cette Transcendance des choses, il vaut mieux, me semble-t-il, s'en remettre à la poésie, sous toutes ses formes, plutôt qu'à la foi.