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Gilles Chambon, "Le pouvoir ne se partage pas", huile sur toile 45 x 60 cm, 2021
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« Le pouvoir ne se partage
pas ». C’est le précepte qu’aurait suivi Romulus en tuant son jumeau
Rémus, lors de la fondation de Rome.
Cela évoque tous les meurtres
accomplis depuis, et dans tous les continents, pour écarter ceux qui menacent
celui qui prétend au pouvoir, ou qui le détient déjà.
Mais on peut aussi y voir la
réminiscence de l’ancien rituel des rois sacrés, décrit par James G. Frazer et
par Robert Graves. Trace d'un matriarcat originaire, prédominant en Europe et
en Asie à époque préhistorique, ce rituel aurait été lié au culte d'une
déesse-mère chtonienne, avec élection d'un éphémère roi sacré, sacrifié au
moment de l’année déclinante et remplacé chaque saison par son alter-ego.
C’est peut-être la raison qui
fait que le thème de l’affrontement gémellaire se rencontre dans beaucoup de
mythologies et cosmogonies indo-européennes et moyen-orientales :
- Chez
les Celtes, la lutte de Gwyn et Gwythur pour la main de Creiddylad (mythe que
reprend Shakespeare dans Le roi Lear).
- En
Inde la lutte de Sundas et Upasundas pour la belle Tilottomâ.
- En
Islande celle de Cormac et de Corc Ouibne.
- En
Iran celle de Ohrmazd et Ahriman et celle de Aexsaert qui est tué par Aexaertaeg.
- Chez
les Egyptiens, le meurtre d’Osiris par son frère jumeau Set.
- Dans
le récit biblique : Caïn et Abel, Esaü et Jacob, mais aussi la querelle sur la
préséance de Pérèc (la brèche) ou de Zérah (le fil écarlate) [neveu de Joseph,
fils de Juda].
- La
même problématique est exprimée sur un mode métaphorique dans le Nouveau
Testament avec la parabole de l’enfant prodigue.
De nombreux autres exemples
pourraient aussi être trouvés dans les mythologies ou cosmogonies africaines et
sud-américaines.
Ce tableau symbolise donc l’acte
de violence initiale, envers soi-même ou son double, qui préside à toute
fondation et à tout renouvellement. Il associe synchronistiquement un tableau
de Vuillard (La boîte à ouvrage) que j’ai fortement détourné, avec des
personnages de Georges Moreau de Tours (1848-1901) et d’un dessinateur anonyme
du XVIIIe s.