G. Chambon, La grande muraille de Saint Émilion, huile sur carton toilé, 2013 |
Rien à voir avec celle de
Chine ! La « grande muraille » de Saint Émilion, haut mur
insolite qui se dresse à l’entrée du village, fait au mieux une trentaine de
mètres de long. Il s’agit des restes de l’ancienne église du monastère des
Dominicains, construit au XIIIe siècle en dehors des remparts de la ville,
comme c’était souvent l’usage pour les ordres prêcheurs.
Mais pendant les temps troublés
de la guerre de cent ans, les frères ont dû se replier à l’intérieur des remparts,
abandonnant leur ancien monastère, livré alors aux pillages et aux
dégradations. Seule aujourd’hui subsiste cette « grande muraille »,
plantée là comme un vaisseau improbable, avec d’un côté la route et de l’autre
la vigne. Elle ne sert plus à rien, mais on y lit mieux qu’ailleurs l’érosion
des siècles passés.
Les romantiques considéraient la ruine comme un
élément essentiel de l’esthétique du paysage : à cause de son pouvoir
d’évocation historique, mais aussi à cause de ses formes altérées, creusées par
les vents et rongées par la pluie, qui entrent peu à peu en osmose avec les lignes
naturelles du paysage. Comme l’écrivait Chateaubriand, « elles fournissent
au cœur de majestueux souvenirs et aux arts des compositions touchantes »
(Chateaubriand, Génie
du Christianisme, III, v,3). L’humble travail du peintre est le premier
concerné.
Cette toile est un hymne à la végétation donc à la vie et à son dynamisme plus qu'une ode à la décrépitude des pierres. Mais l'écriture (du commentaire) rattache d'avantage à l'histoire des lieux et à la nostalgie. Cette coexistence du vivant et du mort est sûrement très pittoresque pour qui sait regarder!
RépondreSupprimerJacques Deruelle
Bonsoir Jacques
RépondreSupprimerLa terre, la terre nourricière, sur laquelle pousse la vigne, est faite des restes des vies passées d'organismes retournées à la poussière... et les ruines dans le paysage, la décrépitude des pierres, comme tu dis, est un peu l'humus de l'imagination, pour le peintre et l'architecte.
G. C.